Mordecai MOREH, des bêtes humaines.

MOREH Mordecai
Les oiseaux dans la nuit. 
   
Né en 1937 à Bagdad, Mordecai MOREH n’eut de cesse de changer de territoire. Exilé en Israël en 1951, étudiant ensuite à Florence en 1960 avant de s’installer définitivement en France en 1962, les déplacements incessants de l’artiste trouvèrent un écho dans la variété de ses lectures et de ses influences culturelles. 
      
MOREH Mordecai
La promenade. 1960.
           
Curieux de toutes sortes de textes explorant la spiritualité humaine, Moreh sera nourri d’ouvrages aussi divers que ceux du philosophe indien Rabindranath Tagore, de l’allemand Friedrich Nietzsche, du poète libanais Gibran Khalil Gibran ainsi que par les principes du bouddhisme et du mysticisme chrétien. Son œuvre restera imprégnée de ses lectures consciencieuses de la Bible et du Midrash mais également des nombreux recueils de contes qui lui furent lus par sa mère, nourrissant un imaginaire déjà luxuriant. 
       
  
 MOREH Mordecai
Lait de Vierge (Rhinocéros). 1988.
    
Parmi les œuvres que Moreh entendra enfant se trouve notamment les Fables de La Fontaine, un univers animalier dont on retrouve bien évidemment des traces fortes dans l’obsession de l’artiste pour la représentation animale. S’il va régulièrement observer les animaux gardés dans les zoos d’Europe durant toute l’année 1982, notamment pour la production de ses rhinocéros, c’est bien l’être humain que l’artiste caricature derrière les crocs et la fourrure. Tout comme l’avait fait La Fontaine avant lui, les bêtes ne sont qu’un moyen de tirer le portrait des émotions et des tendances, bonnes ou mauvaises, de la race humaine.
     
   
MOREH Mordecai
Cheval du bois. 1966.
   
Le bestiaire de l’artiste prend une forme singulière, en effet, les animaux représentés prennent souvent les atours de martyrs chrétiens. Comme d’autres artistes du début du XXe siècle, Moreh utilise de nombreux symboles bibliques. Ses bêtes sont ainsi souvent blessées, crucifiées et soumises à la souffrance. A travers ces scènes de violence, ce sont les exactions humaines que l’artiste représente, il n’aura en effet de cesse de décrire les injustices et la cruauté de sa société. Ces représentations très sombres, Moreh en trouve probablement la source dans une enfance marquée par la migration, la peur des pogroms et la pauvreté. Pourtant, son œuvre n’est pas dénuée d’humour ou de joie. Nombreuses sont les œuvres dépeignant des scènes de liesse, de danse, d’amour. Introspection, spiritualité, caricature, tous ces qualificatifs se mêlent dans les œuvres de Moreh qui furent décrites ainsi par le célèbre Pierre Restany « un complément visuel… avec une morale d'amour et de foi ».
Artiste complet dans ses pratiques et prolifique dans sa production, Mordecai Moreh voyagea, comme à son habitude, pour présenter ses œuvres aux quatre coins du globe. 
    
Heidelberg, Mayence, Tel Aviv, Rome, New York, Paris, Bruxelles… Le corpus foisonnant de l’artiste s’expose dans les musées et galeries du monde entier. Encore aujourd’hui, son traitement unique de la figuration fait de son travail un monde à part, dans lequel nous vous proposons de plonger.